366 kilomètres


366 kilomètres, symbole de la route d’une année.

Le confinement est arrivé à son terme, nous sommes libérés, délivrés.

Ce lundi 11 mai, j’ai en tête ce projet depuis quelques jours, un autre défi, dans la lignée de ceux du confinement, les 24 heures Home-trainer 4 semaines plus tôt, 2020 pompes en un après-midi ou les 4 x 6 heures fin avril en plus de mon fil rouge, ma transformation corporelle dont l’objectif est ce jour du 11 mai, un contraste saisissant avec l’épave que j’étais tout juste un an plus tôt, à la dérive après mes problèmes de dos, sans envie, ni énergie, 12 kilos et 12 mois séparent ce jour sombre de ce jour où je peux dévoiler des photos resplendissantes d’un homme bien dans sa peau et au physique athlétique.

Mon nouveau défi peut donc attendre 24 heures supplémentaires et un temps plus clément, du mois moins pluvieux car ce mardi matin, deuxième jour des saints de glace, n’en sera pas moins froid, presque glacial, le jour où le mercure est au plus bas depuis mon arrivée en Gironde, il ne dépassera pas les 6 degrés.

C’est un autre bon symbole, ce 12 mai, c’est le jour du symbole du début de ma rédemption, de ma résurrection presque et je décide de le fêter à ma façon, sur le vélo. Ce 12 mai 2019, j’avais parcouru 183 km, j’entreprends ce matin-là de partir pour le double, 366 km, et oui l’année bissextile m’oblige à allonger encore un peu les ambitions.

Il est 7h30, le jour se lève à peine, si on peut parler de jour tant les nuages, noirs, sont bas, le ciel oscillant entre nuances d’anthracite et de noir, après quasiment 2 mois de soleil sans pouvoir mettre le nez sur les routes, le temps est très humide mais les gouttes resteront accrochées aux nuages comme pour rester spectatrices de ma performance, comme si elles se demandaient si j’allais le réaliser.

Au bout de 100 mètres, je m’arrête pour vérifier ma direction, elle va bien, c’est simplement déconcertant de retrouver la route après 8 semaines à ne faire que du home-trainer, et j’en ai fait beaucoup, environ 200 heures, soit une moyenne de 25 par semaine (dont déjà 48 avec les deux défis de 24 heures), il faut reprendre ses repères.

Avec le froid et cette habitude perdue, les kilomètres ne s’enchaînent pas au rythme espéré avec la forme actuelle, secrètement j’espère rouler entre 32 et 33 km/h de moyenne sur un parcours en boucle le long et autour de la Dordogne, dans lequel le dénivelé est très faible, il ne dépassera pas les 500 mètres d’ailleurs. Il me faut à peine une heure pour comprendre que la journée sera difficile, je ne suis pas dans ma meilleure et j’aime la clarté et la chaleur, c’est donc un défi de plus à surmonter que de tenter cette performance ce jour-là, le haut du corps n’a plus l’habitude de devoir tenir le guidon pour le diriger, de regarder loin devant et souffre davantage que le bas du corps, de plus, il a été bien sollicité en musculation les derniers jours, si « un corps qui souffre est un corps qui vit » comme j’aime souvent à le dire, je me sens bien vivant aujourd’hui.

Ma boucle me ramène régulièrement devant la maison où je ferai halte deux fois, après 200 et 280 kilomètres pour me restaurer : chocolat chaud, croque-monsieur, pommes de terre, café. Des aliments salés et chauds apportent le réconfort et permettent de sortir du goût sucré de la boisson d’effort, des bananes, gâteaux et pâtes de fruit que j’ingurgite régulièrement et qui, à la longue, deviennent écœurants, un défi d’ultra endurance pas si évident à tenir avec le corps le plus sec que je n’ai jamais eu, sûrement à 5 ou 6% de masse grasse mon affûtage actuel, une forme qui rend plus difficile la lutte contre le froid, auquel le corps a également perdu l’habitude, il est vrai qu’il est plus facile d’affronter le froid en plein hiver quand le corps s’est adapté qu’une sortie montagnarde en juillet quand la météo frise avec des températures négatives.

Tout au long des 12 heures et 15 minutes qu’il me faudra pour achever mon parcours, rentrant à 20h10, alors que la luminosité commence à décliner dangereusement, j’ai le temps de repenser à tout ce parcours d’une année, ses hauts, ses bas, à mes choix, à mes chutes, à ceux qui m’avaient aidé à me relever, à ceux que j’avais aidé à me relever, une année riche, une année un peu folle, les meilleurs 366 jours de ma vie malgré toutes les épreuves que j’avais endurées, affrontées mais maintenant dépassées et qui m’avaient rendu plus fort et endurant que jamais. Aurais-je pensé à ça un an plus tôt ? Certainement pas, et pourtant je venais de le réaliser !